Le scandale des airbags Takata : quand un équipement de sécurité devient mortel

C’est l’un des plus grands scandales de l’histoire de l’automobile, le « Takata Gate », qui dépasse même le Dieselgate de Volkswagen par le nombre d’unités concernées (estimé à plus de 200 millions de véhicules dans le monde). Et cela touche quasiment tous les constructeurs de la planète (vérifiez si votre voiture est concernée).
Explication sur la chronologie des faits, ce que les constructeurs automobiles savaient et ont appliqué ou n’ont rien fait.
Le choix dangereux de Takata
Takata, une entreprise japonaise fondée en 1933, était initialement spécialisée dans la fabrication de suspentes de parachutes, ce qui l’a menée naturellement vers le tissage et la production de ceintures de sécurité à la fin des années 70.
L’explosion de la demande d’airbags dans les années 90, vus comme une innovation révolutionnaire en automobile, a poussé Takata à se lancer sur ce marché en utilisant son expertise du textile. Un airbag se compose de trois éléments principaux : le coussin, un boîtier électronique et un explosif servant à générer un souffle pour le gonfler.
Pour proposer des airbags 10 à 15 % moins chers que la concurrence, Takata a opté pour le nitrate d’ammonium comme propulseur explosif. Ce composé était idéal car il était peu coûteux, dense et facile à déclencher. Cependant, il présentait un défaut majeur : il est sensible à l’humidité et corrosif (acide), rongeant le métal de la capsule au fil du temps.
Dissimulation et conséquences mortelles
Dès l’an 2000, Takata constate lors de tests internes que certains airbags se déclenchent trop fort, provoquant une explosion au lieu d’un simple gonflage. L’explosif, devenu instable à cause de l’humidité qui s’infiltrait avec le temps et la corrosion de la capsule (principalement après 5 à 15 ans sur le marché), se transformait littéralement en grenade.
En 2004, des ingénieurs confirment que les airbags vieillissent mal. La direction de Takata choisit d’enterrer et de détruire tous les résultats des tests par crainte de voir le cours de l’action s’effondrer et l’entreprise faire faillite en cas d’aveu de culpabilité (une admission de problème aux États-Unis entraînant d’énormes sanctions).
Le premier décès officiel lié à un airbag Takata survient en 2013 aux États-Unis, suite à un choc à faible vitesse où l’airbag explose, projetant des fragments de métal mortels dans l’habitacle et sur le conducteur.

L’éclatement du scandale et la faillite
En 2014, deux ingénieurs mécontents révèlent tout à la presse, forçant Takata à assumer. Entre 2014 et 2016, Takata doit gérer le rappel de 64 millions d’airbags rien qu’aux États-Unis.
En janvier 2017, Takata est lourdement sanctionné avec une amende d’un milliard de dollars aux États-Unis et des peines de prison ferme pour trois de ses dirigeants.
Le 26 juin 2017, Takata dépose le bilan. Sa faillite a pour conséquence de transférer la charge financière des rappels et des garanties des airbags défectueux vers les constructeurs automobiles (Audi, BMW, Ford, Honda, Toyota, Peugeot, Renault, Tesla, Ferrari, etc.), certains comme Ford et General Motors estimant les coûts à plusieurs centaines de millions, voire un milliard de dollars.
Impact en France et actualité
En France, l’affaire a connu un écho particulier dans les Outre-mer où le climat chaud et humide aggrave le problème de l’humidité, avec 17 décès estimés. Plus récemment, un décès en juin 2025 à Reims a incité le gouvernement français à interdire la circulation de 1,7 million de véhicules potentiellement concernés.

Aujourd’hui, l’association UFC-Que Choisir a déposé plainte pour réclamer une enquête et une réparation pour les milliers de victimes et de clients concernés par ces airbags, qui seraient directement responsables d’une trentaine de morts (chiffre probablement sous-évalué) dans le monde.





